Une nouvelle République
Vendredi 03 Novembre 2006 "Une nouvelle République" - L'Hebdo des Socialistes Chère camarade, cher camarade, Le projet des socialistes lie intimement la refondation de la République et les objectifs qu?il trace pour la France : réussir le plein emploi dans un développement durable, construire l'égalité réelle, faire réussir la France en Europe et dans le monde. Car la crise économique, sociale et politique qui affaiblit le pays et exaspère nos concitoyens est à la fois une crise des résultats, dont témoignent en premier lieu les ravages de l'insécurité sociale et de la précarisation généralisée, et une crise de la démocratie. La droite a depuis cinq ans montré l'arrogance du pouvoir, l'obstination dans l'affaiblissement du pacte social, l'aveuglement dans la conduite dans l'économie. La France est une nation éminemment politique où l'État est le garant du pacte social et où la République, si elle manque à sa promesse, vacille sur ses bases. Nous devons relégitimer l?action publique, en renforcer l'efficacité et restaurer la crédibilité de la parole politique. Les Français ne sont pas brouillés avec la politique, ils ne supportent plus le cynisme en politique, l'absence d'éthique et la conception clientéliste du pouvoir, si caractéristiques de la droite. Que constatent et que vivent nos concitoyens ? La République mise à mal par des inégalités révoltantes, un pouvoir d'achat écrasé, une école qui n?a plus les moyens de bien fonctionner, la recherche et l?Université appauvries et l'emploi partout fragilisé. La privatisation et la confusion des pouvoirs, au détriment de l'intérêt général. Au lieu de la franchise, de la transparence et du débat public, le règne de la dissimulation et du coup de force : le recours au 49-3 et aux ordonnances pour échapper au débat au sein de la Représentation nationale. Le CPE a été le symbole de cette manière de gouverner, et seule la mobilisation de la jeunesse, des syndicats et des forces de gauche a permis de faire reculer le gouvernement. Le dévoiement de la décentralisation s?est traduit par le désengagement financier de l?Etat et le transfert de charges sur les collectivités territoriales, sans égard pour les plus démunies d?entre elles. Depuis cinq ans, la droite refuse d'entendre que les Français ont à plusieurs reprises tiré la sonnette d'alarme. L'irresponsabilité au plus haut niveau exacerbe la crise démocratique. Les Français, et c'est bien le moins, veulent être entendus et compris. Il nous appartient de créer les conditions pour sortir de la spirale descendante : non inscription sur les listes électorales, abstentions, votes blancs, votes protestataires. Le projet des socialistes prend la mesure de cette crise. Cette « nouvelle République », qui est au coeur de l'engagement que nous prenons devant les Français, repose sur quatre piliers : ? une démocratie représentative qui représente mieux les Françaises et les Français dans leur diversité, où la responsabilité soit la règle (à commencer par celle du Chef de l'État), où le Parlement soit rétabli dans sa souveraineté. Nous voulons fonder une République parlementaire nouvelle. Cela suppose de supprimer les règles qui brident la représentation nationale (vote bloqué, 49-3, maîtrise excessive de l?ordre du jour par le gouvernement, recours abusif aux ordonnances et aux procédures d'urgence) et d'instituer le mandat unique pour les parlementaires. Cela suppose que le Premier ministre et le gouvernement soient liés par un contrat de majorité et qu'ils présentent leur programme de travail à l'ouverture de chaque session du Parlement. Cela suppose enfin que le statut pénal du chef de l'État soit réformé ; ? une démocratie sociale renforcée. Nos relations sociales sont marquées par un syndicalisme trop faible, qui ne pèse pas assez face au patronat, et une négociation collective négligée. Notre tâche sera de rééquilibrer les pouvoirs entre capital et travail. C'est pourquoi j'ai ouvert un débat sur les moyens à mettre en oeuvre pour renforcer les syndicats, et aller vers un syndicalisme de masse qui est la condition d'une démocratie sociale vivante et bénéfique pour les salariés comme pour la santé de l'économie. Dans les pays européens où les syndicats sont puissants, les salariés sont mieux protégés dans leur emploi et mieux rémunérés. Or cest cela qu'il nous faut atteindre : sécuriser l'emploi, créer une sécurité sociale professionnelle, augmenter le pouvoir d'achat ; ? ne démocratie « plus directe », comme le dit notre projet, qui élargit le pouvoir d?initiative des citoyens et leur consultation. C?est ce qu'on appelle la démocratie participative, qui n'est pas, contrairement à ce qu'on a pu entendre, un affaiblissement de la démocratie représentative. C'est, pour les élus qui la mettent en place, un moyen pour analyser l'impact des politiques qu'ils conduisent et, si nécessaire, les réajuster. C'est aussi une façon de ramener vers la politique les citoyens qui s'en étaient éloignés et qui peuvent y revenir ; une décentralisation aboutie et équitable. Pour assurer le succès de notre projet, nous avons besoin d'une nouvelle République qui s'appuie sur une démocratie représentative rénovée, sur une démocratie sociale renforcée et sur une démocratie plus participative, mais aussi sur une décentralisation aboutie, car toutes les décisions qui peuvent être prises au plus près des citoyens doivent l'être. Mais la décentralisation suppose que l'État, contrairement à ce que fait la droite aujourd'hui, joue pleinement son rôle pour fixer les règles communes, assurer la cohésion nationale, veiller au pacte social et garantir la péréquation des moyens. Pour réussir la décentralisation, il faut un État fort, efficace et juste, c'est-à-dire un État qui assure le transfert des ressources en même temps que celui des compétences. C'est la mission essentielle d?un président de la République d'y veiller.