Libres paroles d'infirmière

Publié le par JL

le Jeu, 01/06/2006

 

Infirmière dessinInfirmière dessin

Qui n’a pas une fois au moins dans sa vie fréquenté un hôpital ? A ceux à qui ce n’est jamais arrivé, comme à ceux qui ne l’aurait que trop vu, il faut conseiller la lecture du livre de Michelle Bressand. (Infirmière, la passion de l’hôpital par Michelle Bressand (Editions Robert Laffont, 17 euros).
Cette infirmière fait partie de ceux qu’elle appelle « les rescapés de l’hôpital » ceux qui y entrent en pensant qu’il vont exercer un métier hospitalier pendant quelques années seulement et qui y sont restés malgré la fatigue, le découragement, la surcharge de travail, le salaire sans commune mesure avec la qualité du service accompli. Et sur la grande misère des hôpitaux français, sur le manque d’infirmières, elle parle en experte.

Il faut trois ans d’école avec entrée sur concours pour devenir infirmière. Trois ans de formation cours et stages alternés, et validation, année après année. Mais ensuite, on apprend sur le tas. Michelle Bressand, elle, a appris beaucoup de son métier et elle a a gravi les échelons : infirmière, cadre aujourd’hui elle dirige les quelques vingt mille infirmières des hôpitaux de l’Assistance publique de la région parisienne. « infirmière » raconte donc son métier, la vie de l’hôpital, des infirmières, les rencontres avec les malades, les familles, les gardes de nuit qui s’étirent le jour parce qu’il manque quelqu’un dans l’équipe, les moments de blues, le trac ou la peur, et les moments de gaieté et même de franche rigolade. Elle demeure dans le quotidien, l’humain. Et il se dégage de tout cela une formidable vitalité, un bonheur de vivre et d’agir comme on n’imagine pas dans ce décor...

LA CANICULE VUE DES URGENCES
Son livre s’ouvre sur la canicule vécue heure par heure dans les urgences et les salles des hôpitaux de Paris. On a oublié un peu ces jours où le public comme les autorité ne mesuraient absolument pas l’ampleur du désastre, alors que les infirmières et les médecins abandonnaient leurs vacances, faisaient la chasse aux ventilateurs, rappelaient leurs retraitées pour des coups de mains...et finissaient par improviser des morgues dans camions frigorifiques. Michelle Bressand pense que nous demeurons incapables d’anticiper et que la même chose pourrait se reproduire avec les mêmes ou presque les mêmes conséquences dans d’autres circonstances : « nous sommes prêts pour une autre canicule mais autre chose, une épidémie... ».

LE MANQUE D’INFIRMIERES

-« Nous ne manquons pas vraiment d’infirmière, nous manquons de temps infirmier. Il y a des dizaines de sortes d’infirmières : en consultation, au secrétariat, en réanimation, en maternité, chaque service est une activité différente. De plus, les infirmières ne restent pas à l’hôpital : elles s’en vont, elles deviennent infirmières libérales, scolaires, institutrices en maternelles. Entre un métier qui vous dévore, avec des horaires complexes, et un pratiquement identique avec le même salaire mais des conditions de travail infiniment plus souples qu’est ce que vous choisissez ? La France ne manque pas d’infirmières.. .Nous allons en manquer lorsque les babyboomers vont partir à la retraite, c’est pourquoi il y a urgence à transformer les conditions de travail hospitalier.

LA GRANDE MISERE DES HOPITAUX
(Elle éclate rire). « Il n’y a pas de grande misère : il y a un management complètement has been qui ne prend en compte ni les changements de mentalités ni les transformations des malades et de leurs familles, plus exigeants et en même temps mieux informés de leurs maladies et de leurs droits. Les techniques de soins ont changé, les infirmières ont sans cesse besoin de se recycler, d’apprendre, elles manquent de temps pour tout. La misère elle réside dans l’absence de gestion correcte, pas du manque de personnel qualifié. »

COMMENT FAIRE MIEUX ?

« Il y a toutes sortes de « petites lignes budgétaires » qui ne devraient pas incomber à l’Assistance Publique, mises bout à bout cela représente beaucoup d’argent.Par exemple, la recherche. Est-il normal qu’un secrétariat pour la recherche soit payé par la sécurité Sociale ? Pourquoi pas par le ministère de l’Education ou de l’Industrie. Autre chose : Il y a tout un bénévolat qui pourrait apporter beaucoup mais qui est mal géré, désordonné. En Allemagne par exemple, les associations d’aide aux malades et à l’hôpital, dépendent des hôpitaux, leur aide est bien organisée et très précieuse. En France ce n’est pas le cas, chaque association fait son travail dans son coin avec parfois beaucoup d’amateurisme et de la concurrence entre elles !

L HOPITAL PUBLIQUE EST IL MENACE ?
« Oui, si nous continuons comme cela, les malades ne voudront plus venir. Or nous offrons malgré tout une des meilleures médecines d’Europe. Il faut que l’hôpital demeure publique pour les malades mais que l’organisation du travail soit gérée comme dans le privé sans empiler des directions, les nouveaux départements avec des gestionnaires qui ne savent rien de la vie d’un hôpital. ».


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