Les retraites, un problème à taux plein pour les candidats

Publié le par JL

le Jeu, 11/01/2007    Société

 

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 Le système ne tiendra pas sans nouvelles réformes douloureuses.

Bis repetita. En 2002, la réforme des retraites était au coeur de la campagne présidentielle. Cinq ans plus tard, elle s'invite à nouveau dans le débat électoral. Ce matin, le président du Conseil d'orientation des retraites (COR), Raphaël Hadas-Lebel, doit remettre à Dominique de Villepin un rapport dont les conclusions sont claires : la réforme de 2003 doit être complétée par de nouvelles mesures, tout aussi douloureuses que celles de la loi Fillon, si l'on veut préserver l'équilibre des régimes. Les candidats ont donc le choix entre l'impopularité ou la perspective de ne pas pouvoir tenir leurs promesses.

«Ce rapport tombe très bien, se réjouit Danièle Karniewicz, présidente (CFE-CGC) de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav). Il faut que les politiques aient le courage de mettre ses conclusions dans leurs programmes présidentiels.» Mais, s'ils le font, ils auront du mal à gagner des voix.
Jusqu'à 64 ou 65 ans. La première préconisation du rapport est en effet d'allonger la durée de cotisation. Aujourd'hui, pour toucher une retraite au taux maximum, il faut avoir travaillé quarante ans. La réforme Fillon prévoit qu'à partir de 2009 cette durée passe à quarante et un ans. Le prochain chef de l'Etat, quel(le) qu'il (ou elle) soit, devra assumer cette décision. Avec l'entrée tardive dans la vie active, cela signifie pour les jeunes générations travailler jusqu'à 64 ou 65 ans. Difficilement compatible avec le programme socialiste en particulier (lire page 11).

Autre nécessité soulignée par le rapport 2007 du COR : améliorer le taux d'activité des seniors. Côté patronal, au-delà des grandes déclarations d'intention, on fait généralement le contraire. Si en France le taux d'activité après 55 ans est un des plus bas d'Europe, c'est le plus souvent parce que les entreprises font tout pour se débarrasser des salariés âgés. La CFDT insiste sur cet aspect du problème, appelant de ses voeux «une politique plus cohérente concernant l'emploi des seniors».

Troisième recommandation : régler la question des régimes spéciaux. Or, à droite comme à gauche, c'est le sujet tabou par excellence. Quand, il y a quelques mois, le sarkozyste François Fillon avait voulu mettre les pieds dans le plat, il avait été fermement prié par les ténors de l'UMP d'éviter à l'avenir un sujet qui avait signé l'échec politique d'Alain Juppé en 1995. Quant aux socialistes, ils veulent encore moins en parler, de peur de se mettre à dos Force ouvrière et la CGT, grands défenseurs des avantages spécifiques des salariés des entreprises publiques. «Il ne faut pas faire croire que la réforme des régimes spéciaux, qui concerne moins de 5 % des retraités, est susceptible de résoudre le problème de financement des autres régimes», s'indignait dès hier soir la CGT, qui par ailleurs «récuse toute idée d'allongement de la durée de cotisation dans le contexte actuel» et «s'oppose à la suggestion de supprimer les "repères de 60 ans et 65 ans" ainsi que les droits qui les accompagnent».

«Inégalités». Le problème, que souligne le rapport du COR, est que ces fameux régimes spéciaux (EDF, SNCF, etc.) sont beaucoup plus généreux puisqu'ils versent 9 % du total des prestations à 5 % des retraités, et qu'il sera de plus en plus difficile de justifier les départs à la retraite avant 60 ans que permettent souvent ces régimes quand les autres salariés devront travailler bien au-delà de cette limite d'âge. «Pour les salariés du régime général, le niveau des pensions est déjà trop bas», estime Danièle Karniewicz, qui considère que ce n'est pas à l'assurance vieillesse de continuer à renflouer les autres régimes, surtout si ceux-ci continuent à offrir des conditions plus favorables que celles qui sont faites aux salariés du privé. La présidente de la Cnav se réjouit que le COR admette dans son rapport qu'il faille «élargir les recettes, y compris par les cotisations» pour financer à l'avenir les retraites. Elle se félicite également que le COR dénonce par ailleurs les effets pervers de l'épargne-retraite, qui tend à «reproduire durant la retraite les inégalités de revenus des ménages durant la vie active».

3,5 milliards de déficit. Si le nombre de cotisants n'augmente pas suffisamment, par des créations d'emploi et par l'allongement des carrières, il faudra bien en arriver là. Car, souligne le COR, la situation financière de la branche retraite de la Sécurité sociale est nettement «plus dégradée que prévu». Son déficit devrait atteindre 3,5 milliards d'euros en 2007, contre 2,4 milliards d'euros en 2006.

François WENZ-DUMAS / Libération

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